Cet article est la retranscription écrite de l'interview du Dr. Sandrine Marlin, spécialiste en génétique de la surdité, qui peut être visualisée en suivant ce lien Youtube.

1- 00:11 --Bonjour Docteur Sandrine Marlin, merci de nous recevoir au sein de l'institut Imagine. Une première question car je ne connaissais pas cet institut : Pouvez-vous nous expliquer en quelques mots qu'est ce qu'Imagine et quelle est votre fonction au sein de cet institut ?

Alors, Imagine est une fondation toute récente puisque nous sommes arrivés dans ce bâtiment en février de cette année (2014) , et en fait, le concept c'est de pouvoir réunir à la fois la prise en charge et la recherche fondamentale dans le sujet de maladies rares.
C'est à dire que dans ce bâtiment, au rez-de-chaussée, vous avez des consultations de médecins spécialistes et ultra-spécialistes de certaines maladies rares. (On appelle maladie rare une maladie qui touche moins d'une personne sur deux mille) et de spécialités différentes.
Donc il y a des spécialistes, or souvent ce sont des gens qui coordonnent ce qu'on appelle des centres de référence maladies rares qui sont des centres vraiment très spécialisés dans la prise en charge et la recherche sur un type de pathologie.
Il y a des consultations au rez-de-chaussée et le reste du bâtiment est dévolu à la recherche fondamentale sur les causes et les traitements de ces maladies rares.
Donc en fait, on a vraiment tout le panel pour la prise en charge actuelle et à venir pour ces maladies rares dans ce bâtiment.
Je suis ce qu'on appelle praticien hospitalier, c'est à dire que je suis médecin à plein temps à l'hôpital Necker mais j'ai aussi du temps que je consacre à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière pour l'étude génétique des patients adultes. Donc en fait j'appartiens au service de génétique médicale de l'hôpital Necker, qui est dirigé par le professeur Arnold Munnich et donc je dirige, je coordonne ce qu'on appelle un centre maladies rares.
En 2004 le gouvernement, le ministère de la santé, a souhaité que soient labellisés un certain nombre de centres pour diminuer l'errance des patients atteints de maladies rares en France. Ces centres doivent répondre à un certain nombre de critères qui sont évidemment la connaissance très pointue de la maladie ou du groupe de maladies, comme les surdités par exemple, c'est un groupe de maladies rares.
Elle doit reposer donc avec une équipe qui fait à la fois de la prise en charge mais qui est aussi adossée ou même pour lequel les médecins sont dans une équipe de recherche fondamentale qui étudie les causes et les traitements pour ces pathologies.
Et donc pour les surdités génétiques, il y a un seul centre maladies rares qui s'occupe exclusivement de surdités génétiques que je coordonne.
Et je coordonne donc un réseau national, avec quatorze autres centres, ce qu'on appelle centres de compétences, qui sont en province, dans les principales villes de province, où j'ai mis en relation une équipe d'ORL, au départ, qui s'occupait des enfants mais parfois ils s'occupent aussi d'adultes. Et maintenant il y a des équipes d'ORL qui s'occupent d'adultes qui sont venues nous rejoindre. Et un ou plusieurs généticiens du CHU -du même CHU-.Et donc ce sont des gens qui vont travailler ensemble. Les ORL vont adresser le patient au généticien qui est particulièrement formé par notre réseau sur les surdités d'origine génétique. Et ce praticien généticien, qui n'est pas un chercheur, qui est vraiment un clinicien qui va poser des questions, qui va examiner la personne, va essayer de trouver, de faire des hypothèses sur quelle est l'origine de la surdité de cette personne.
Donc moi je fais ces consultations à Paris, à Necker pour la partie surdité de l'enfant et à la Pitié-Salpêtrière pour la partie adulte.
Je travaille en priorité avec le service d'ORL pédiatrique de l'hôpital Necker dirigé par monsieur Garabedian et avec le service d'ORL adulte du professeur Sterkers de la Pitié-Salpêtrière.

2 - 05:24 --Dans la présentation de 2004 que vous aviez faite lors de notre assemblée générale, vous parliez des débuts des tests génétiques de la surdité en France. Pouvez vous nous dresser un bref état des lieux , 10 ans après ? Et combien de gènes responsables d'une surdité ont été identifiés ? Sont ils tous détectables par un examen ?

Alors en fait, le premierr gène responsable de surdité isolée (ce qui veut dire une surdité sans autre signe clinique, sans autre problème, sans pathologie d'un autre organe, puisque un gène peut avoir une action extrêmement ciblée dans l'oreille interne et comme il n'est pas normal, d'être responsable que d'une surdité mais aussi il peut avoir d'autres rôles et donc ça peut donner une surdité qui s'accompagne d'autres problèmes.)
Si donc on s'intéresse aux surdités isolées pour lesquelles le gène a une action qu'au niveau de l'oreille interne, le 1er gène a été découvert en 1995. Il s'agissait d'un gène qui donne une surdité uniquement chez les garçons. Puis en 1999 a été découvert un autre gène qui s'appelle « la connexine 26 » qui est responsable de la forme majeure des surdités de l'enfant puisque ça représente 1 cas sur 3. Donc nous avons montré ça en 99, dans le laboratoire de Christine Petit à l'institut Pasteur.
Depuis, il y a eu beaucoup de recherches et chaque année on découvre de nouveaux gènes responsables de surdité .Il doit y avoir à peu près,( je dis à peu près parce que peut être aujourd'hui un nouveau gène a été découvert ), entre 85 et 90 gènes différents qui ont été montrés comme responsables de surdité sans autres problèmes cliniques. Alors ça c'est la connaissance théorique .Le problème est de passer à la pratique puisqu'il y a une différence entre mettre en évidence un gène responsable d'une surdité dans un laboratoire de recherche -recherche que l'on fait sur certains patients ou sur quelques familles- et offrir cette possibilité de test génétique au plus grand nombre. Donc là on passe d'un champ de recherche à un champ de pratique et là est le problème puisque il est extrêmement couteux, long et délicat de faire des tests génétiques. Donc on a, petit à petit, dans notre laboratoire, monté un certain nombre de tests génétiques on en a à peu près une quinzaine qu'on peut offrir d'une façon routinière. C'est-à-dire juste avec une prise de sang à la suite d'une consultation de génétique. Là j'insiste :c'est pas n'importe quel médecin qui va prescrire cet examen, ça sera fait dans notre laboratoire et là c'est vraiment un laboratoire de diagnostic, c'est un laboratoire médical, hospitalier, ce n'est pas un laboratoire de recherche.
Jusqu'à maintenant on en était là. Et depuis très peu de temps on met au point une nouvelle technique qui adapte une technique qui a été utilisée au départ en recherche mais maintenant qui va de plus en plus passer dans les laboratoires hospitaliers, qui consiste, pour un seul patient, à regarder des dizaines de gènes à la fois, puisque avant, on était obligé de cibler la recherche sur un seul gène en fonction des critères qu'on avait, par exemple la surdité : Quand commence cette surdité ? Est ce qu'elle s'accompagne d'une malformation de l'oreille interne, est ce qu' elle évolue ? Quelle est la forme de la courbe d'audiométrie ? Donc, mais bientôt , on espère bientôt, nous pourrons avoir une technique qui va nous permettre d'aller beaucoup plus vite parce que on a mis sur une sorte de « puce » des fragments d'ADN les uns derrière les autres, qu'on peut analyser et qui sont des fragments qui correspondent aux gènes impliqués dans un certain nombre de surdités isolées, donc on fait à peu près une quarantaine de gènes à la fois. On a choisi une technique qui nous permettra de faire à peu près 40 gènes à la fois dans un premier temps, les 40 plus fréquents et sur une 2ème « puce » on va dire une puce plus rare encore, des gènes un peu moins fréquents quand la 1ère est négative.
C'est une technique qui a commencé à voir le jour dans d'autres pays en particulier aux Etats-Unis chez le professeur Richard Smith qui a une expérience un petit peu plus ancienne que la nôtre, mais chaque pays est différent, les gènes ne sont pas forcement les mêmes en fonction des ancêtres d'où l'on vient et donc on ne peut pas calquer exactement ce qu'il a fait sur ce qu'on va trouver, même si on a des ancêtres en commun entre l'Europe et les Etats-Unis.
Et donc nous nous avons récemment reçu le matériel pour commencer ces tests. Il va falloir évidemment passer par une étape de mise au point, on va d'abord prendre des échantillons sur lesquels on sait ce qu'on va trouver pour vérifier qu'on trouve bien avec notre 1ère technique ,ça c'est indispensable puisque c'est une nouvelle technique, il faut qu'elle soit validée. Et puis après nous allons prendre des cas familiaux pour lesquels on sait que c'est génétique puisqu'il y a plusieurs personnes qui sont atteintes dans la même famille et pour lequel on n'a pas résolu la cause pour lequel le nombre de gènes qui était potentiellement responsable ne sont pas impliqués dans cette surdité et on va commencer par l'étude sur cette puce des cas familiaux. On va faire un STOP, on va regarder ce qu'on trouve et ça va nous permettre probablement de reclasser la priorité de savoir par exemple (je pense que la connexine 26 restera toujours le gène le plus fréquent de la surdité de l'enfant) mais par exemple dans les surdités progressives de l'adulte, on connait un grand nombre de gènes, on en connait une quarantaine, on sait que certains sont un peu plus touchés que les autres mais on n'a pas assez de recul comme pour les surdités de l'enfant pour en être certain. Donc cette étude-là avec plusieurs gènes à la fois va nous permettre probablement de remettre en priorité et de savoir quel est le classement en terme de fréquence par exemple dans les surdités qui commencent à 20 ans ou 30 ans ou 40 ans , donc ça c'est la technique d'avenir, mais c'est un avenir proche et on espère que ça va donner beaucoup de résultats .
Je dois quand même vous dire que c'est une technique qui est aussi, non seulement c'est très délicat sur le plan technique, mais il y a une étape après l'analyse qui va être compliquée ,qui est de valider les résultats qu'on a parce que pour résumer :nous avons 46 chromosomes par cellule , 23 viennent de papa, 23 viennent de maman, sur chacun de ces chromosomes nous avons des milliers de gènes, on en a à peu près 30 000 par cellule , fois 2 ,une copie papa, une copie maman, chaque gène est fait d'un code donc c'est comme si on faisait des phrases avec 4 lettres : un A ,un T ,un C, un G , et donc l'analyse génétique c'est la lecture de chacune de ces phrases ou chacun de ces gènes et qu'est ce qu'on fait ? on cherche la différence par rapport à la phrase qu'on considère comme « normale» .C'est-à-dire qu'on va chercher une faute d'orthographe, une lettre qui va être remplacée par une autre, une lettre qui manque ,une lettre en trop, schématiquement. Une fois qu'on trouve ça il faut être sûr que ce qu'on a trouvé, cette variation dans le code est vraiment responsable de la maladie parce qu'on a tous des écritures un petit peu particulières de certains de nos gènes qui ne vont pas du tout gêner le gène dans sa fonction et donc l'organe va fonctionner correctement et c'est juste une sorte de grain de beauté sur le gène, une petite particularité personnelle mais ça ne va pas être responsable de la maladie.
Donc autant certaines anomalies dans le gène sont certaines, par exemple quand il manque une lettre ou quand il y en a en trop , dans la grande majorité ce gène ne peut pas donner naissance à une protéine et donc ça ne peut pas fonctionner. Mais par exemple les changements dans les codes génétiques d'une lettre par rapport à une autre ce qu'on appelle je dis « lettre » en fait mais nous on appelle ça des« bases » donc d'une base par rapport à une autre par exemple un T à la place d'un A, (d'une Tinine à la place d' une Adénosine ) et bien il faut être certain que ce changement va entrainer une pathologie et donc là ça peut être compliqué dans l'interprétation .
Je vous fais ce bémol parce qu'il ne faut pas penser que c'est un miracle cette technique.

3 - 15:07 -- Quel cadre légal, en France, concerne le dépistage pendant la grossesse ? Et dans quels cas est ce autorisé ? Est ce qu'il est possible, actuellement, d'avoir un dépistage génétique durant la grossesse ?

Alors tous les diagnostics prénataux, je parle de maladies génétiques en général, sont régis par une même loi, une loi d'éthique, qui est en fait une loi qui dit qu'on a le droit de faire un diagnostic prénatal et donc "une interruption de grossesse", puisque ça peut être le cas si le bébé est atteint, s'il y a un fort risque d'une maladie d'une particulière gravité, non traitable au moment où on fait le diagnostic, voilà ça c'est les termes de la loi. Donc après, il n'y a pas de liste de maladies pour lesquelles on a le droit de faire ça et pour lesquelles on n'a pas le droit.
Comment ça se passe ? Imaginons qu'un couple ait un antécédent d'une maladie X chez un premier enfant ou qu'une des personnes du couple soit elle-même malade, elle va voir un médecin qui va être le porte-parole de son dossier auprès de ce qu'on appelle un centre de diagnostic prénatal, ce médecin étant dans un hôpital où il y a ce centre de médecine prénatale et devant une assemblée de médecins, on va présenter le dossier pour savoir si les médecins de ce centre considèrent que le dossier de ce couple répond aux termes que je vous ai dit : fort risque , maladie d'une particulière gravité sans traitement actuel et là si plusieurs personnes considèrent dans ce staff (dans cette réunion ) que ça répond à ça (il y a des critères, il faut que ce soit un certain nombre de personnes, il faut que ces personnes aient une agrémentation auprès du ministère de la santé, c'est vraiment très encadré), donc si ces gens qui ont l'autorisation de donner cet avis sont d'accord, à ce moment là on fera un diagnostic prénatal et si le bébé est atteint, si le couple souhaite toujours interrompre la grossesse, on interrompra la grossesse ou s'ils le souhaitent ils pourront demander à avoir accès à ce qu'on appelle le diagnostic pré-implantatoire, c'est une fécondation in vitro donc ce n'est pas un bébé sous la couette comme je dis aux parents, c'est une fécondation in vitro avec un tri des embryons en fonction de : est-ce qu'il est atteint ou est-ce qu'il n'est pas atteint ? S'il n'est pas atteint on le remet dans l'utérus de la maman et elle continue sa grossesse tranquille.
En fait la loi régit les 2 pratiques.Donc il n' y a pas comme je vous l'ai dit de liste de maladies pour lesquelles on est autorisé à faire ce diagnostic ou pas. C'est porté à l'appréciation de spécialistes de ces centres de diagnostic prénatal.
Maintenant si on veut répondre d'une façon générale sur les surdités: d'une façon générale, si une surdité est parfaitement isolée c'est à dire qu'il n'y a pas d'autres handicaps, que l'on sait que c'est une surdité qui ne va pas s'accompagner d'autres maladies graves associées, il n'est pas habituel d'accepter les demandes de parents ou d'adultes qui demanderaient un diagnostic prénatal parce qu'on considère d'une façon générale que ça ne répond pas aux termes de la loi, que ce n'est pas une maladie d'une particulière gravité et qu'il y a une prise en charge en France qui est efficace et que donc on considère que ça ne justifie pas une interruption de grossesse.
Donc ça se fait, ces diagnostics prénataux ,que dans le cadre d'une maladie qu'on appelle syndromique, de surdité syndromique avec d'autres handicaps par exemple : surdité/handicap visuel, surdité/handicap mental, surdité/malformation grave d'un autre organe ou pour des couples vraiment dans une situation extrêmement particulière pour lesquels les circonstances ont fait que là on considère que pour ce couple là c'est d'une particulière gravité.
Voilà puisque l'éthique c'est aussi l'éthique de chacun et que donc on doit juger dossier par dossier, famille par famille.

4 - 20:08 --En 2014, vous disiez que les dépistages génétiques permettaient de faire de la prévention chez les membres d'une famille touchés. Que peut on faire lorsque l'on constate la présence d'une anomalie génétique entraînant une surdité ? Est ce que la génétique peut permettre de mettre en place d'autres suivis que la surdité ? Et peut on prédire qu'une surdité risque d'être évolutive grâce à la génétique ?

Un diagnostic génétique ça permet:
-premièrement de savoir si c'est génétique c'est à dire de mettre un nom sur la cause. Je me souviens du terme d'une maman qui me disait que pour son enfant qui avait une surdité et d'autres problèmes, le fait de lui avoir donné un nom de pathologie, elle savait maintenant qu'elle était "le grand méchant loup qui venait manger dans sa gamelle tous les jours" et que pour elle c'était super important. Parce que souvent les gens se posent des questions: ils se demandent s'ils n'ont pas fait, les mamans, des problèmes pendant la grossesse, des erreurs pendant la grossesse, ou après, telle personne pense que peut être c'est parce qu'elle a pris tel médicament, où a eu de son activité professionnelle, ou fait du sport, plein plein de fantasmes qui s'arrêtent quand déjà on a une cause. ça c'est la première chose : avoir une cause.
- deuxièmement: savoir si cela va évoluer ou pas cette perte auditive. parce que effectivement il y a des gênes qui entrainent des surdités très stables et il y en a d'autres qui vont entrainer une surdité qui va évoluer ou va fluctuer dans le temps. On peut donner un diagnostic évolutif en fonction de l'atteinte génétique. Ca permet de savoir comment cela se transmet, est ce qu'il y a des risques de transmettre à un autre enfant ou à des petits-enfants ou à des frères et sœurs; ça dépend de qui on voit en consultation et ça répond à cette question là. Cela permet de savoir s' il y a d'autres problèmes qui vont survenir sur le plan d'autres organes donc quand il s'agit de prévention la réponse est oui sur d'autres organes Par exemple: des surdités peuvent s'accompagner de diabète qui peut survenir ultérieurement, ou de problèmes neurologiques ou de problèmes cardiaques, de problèmes rénaux... Evidemment, il va falloir surveiller cette personne et si on fait cette surveillance très précoce, dès la toute petite différence, petite anomalie, on va pouvoir donner un traitement qui fait que cette maladie ne va pas évoluer. par exemple pour des problèmes de thyroïde, si on voit qu'un problème va commencer à survenir on va éviter qu'apparaisse ce qu'on appelle un goitre c'est à dire un gonflement de la thyroïde. Pour le diabète on peut faire plus attention à l'alimentation quand on sait que cette personne est à risque de faire un diabète. On sait aussi par exemple qu' Il y a aussi des surdités génétiques qui vont, pas forcément chez la personne qui a l'atteinte génétique, développer cette surdité dès le départ mais en tout cas, si on lui donne un type de médicaments, comme elle est plus sensible à certains médicaments, là elle va avoir une surdité profonde. Donc Ca permet de dépister chez les enfants, de prévenir ça chez les enfants, en disant tel et tel enfant est porteur de cette anomalie, il ne faut absolument pas, sauf cas vital, utiliser ce type d'antibiotique. Cela permet de faire des préventions comme ça.
Aujourd'hui, on n'en est pas à pouvoir chez l'humain prévenir l'apparition d'une surdité avec de la génétique mais c'est probablement l'avenir.

5 - 24:00 --Là , dites vous, chez l'humain, donc cela veut dire qu'il y a déjà des choses chez l'animal ?

Oui, alors chez l'animal, il y a eu plusieurs axes de recherche.

Il y a un axe de recherche qui permet d'essayer d'introduire un gène normal dans les cellules de la cochlée pour que ce gène normal puisse donner naissance à une protéine normale qui va faire re-fonctionner ou soutenir les cellules présentes et donc cette surdité va être stoppée ou voire ne pas apparaître si on intervient précocement. Ce sont déjà des choses qui ont été faites chez l'animal. Par exemple, dans une forme de surdité de l'adulte, pour un gène qui donne une surdité de l'adulte, ils ont, chez les toutes petites souris qui n'avaient pas encore de surdité, réintroduit le gène dans les cellules de la cochlée. Et cela a permis de ne pas développer de surdité chez ces souris. Donc, elles avaient l'atteinte génétique de départ mais leur oreille interne a été traitée avant l'apparition de la surdité. Donc, elles ne sont pas devenues sourdes. Donc ça, c'est le premier axe de recherche.

Le deuxième axe de recherche, c'est un axe de rechercher sur les cellules souches. Dans la cochlée, il y a un certain nombre de cellules qui sont des cellules qui ne se sont pas développées parce que, naturellement, toutes les cellules ne se développent pas dans chacun des organes. C'est une sorte de "stock" de cellules qui n'ont pas évolué jusqu'à devenir un organe mature , une cellule mature. Et donc chez l'animal, chez le rat, ils ont rendu ce rat sourd avec des méthodes artificielles (avec ces fameux antibiotiques qui sont mauvais pour la cochlée).donc toutes les cellules ciliées ont été détruites. Ils ont introduit un gène dans la cochlée qui a permis de faire repousser les cellules ciliées à partir de ce qu'on appelle des cellules souches. C'est comme si on remontait dans le temps et qu'on faisait un embryon de la cochlée qui repart avec la création de cellules normales. Et donc, ces ratons ont réentendu.

Ce sont deux axes, en sachant que c'est peut être deux axes qu'il faudra combiner parce que chez une personne, par exemple prenez un enfant qui naît sourd profond (dû à une anomalie génétique), il faut, non seulement recréer les cellules mais en plus il faut évidemment que ces cellules, on les corrige. Parce que, si elles repoussent avec le même défaut génétique, cela ne va pas marcher. Donc Il faudrait non seulement refaire créer des cellules ciliées par les cellules souches mais en plus, corriger dans ces cellules souches le défaut génétique. Donc, Il y a donc aussi beaucoup de gens qui travaillent à trouver les moyens d'introduire ce gène dans la cochlée (qui est quand même un organe très précieux, qui est très caché). Ce n'est pas comme un œil où on a vraiment la possibilité d'introduire des gouttes. Pour aller dans la cochlée, c'est beaucoup plus compliqué. Donc, Il faut trouver des moyens de pouvoir introduire ce gène à l'intérieur d'un virus qui va infecter les cellules mais qui n'est pas un virus qui va donner une maladie. On l'utilise simplement comme "transporteur", comme "véhicule". Savoir comment est ce qu'on peut introduire ce virus dans l'oreille sans léser l'oreille, que ça aille dans des cellules qui nous intéresse, parce que si ça va dans des cellules qui ne servent à rien, ce n'est pas la peine, dans un nombre de cellules suffisant et pendant très longtemps.

Voilà, donc tout ça, ce sont des recherches qui sont faites actuellement chez l'animal et qui, quand même sont faites pour que dans quelques années, il y ait les premiers essais thérapeutiques chez l'homme.

6 - 28:21 --Je vais vous poser quelques questions qui nous ont été adressées par nos adhérents : Une personne nous a demandé si deux personnes sourdes sont porteuses d'anomalies génétiques différentes mais recessives, par exemple la connexine 26 et le syndrôme de Pendred, est ce qu'ils sont certains d'avoir des enfants entendants ?
Tout d'abord, il faut expliquer ce que veut dire « récessif » parce que je pense qu'il y a pleins de gens qui ne savent pas ce que veut dire « récessif »
Il y a plusieurs modes de transmissions d'une maladie génétique. Il y en a globalement 4. Il y a, dans les surdités qui commencent dans l'enfance, le mode de transmission le plus fréquent c'est ce qu'on appelle « récessif » ça veut dire que ça touche les garçons et les filles, puisque ce n'est pas lié aux chromosomes sexuels, le gène n'est pas un chromosome sexuel, donc ça va toucher un petit garçon, une petite fille .
Et comme je vous l'ai dit tout à l'heure, nous avons 2 copies pour chaque gène. Pour la maladie qu'on appelle « récessive » c'est-à-dire la plupart des surdités congénitales ou qui surviennent pendant l'enfance, il faut que les 2 copies du même gène soient anormales pour avoir une surdité ,
si vous avez une copie normale et une copie qui n'est pas normale , vous êtes ce qu'on appelle « porteur » et vous ignorez que vous avez cette anomalie, vous êtes parfaitement entendant ,il faut savoir que sur nos 30.000 gènes on est tous porteurs de 100 ou 200 anomalies, comme ça, qui touchent qu'une seule copie et donc on ignore complètement qu'on a ça. Ca nous a été transmis mais si on ne rencontre pas le conjoint qui lui-même est porteur on a pas de risques d'avoir des enfants atteints.
Donc là dans les maladies récessives, un ou plusieurs enfants de la même famille sont atteints garçons ou filles , et les deux parents sont porteurs de la même anomalie génétique ou du moins d'une anomalie dans le même gène ,mais en général ils sont entendants, c'est-à-dire qu'ils ont une copie normale et une copie qui ne l'est pas . Et donc à chaque grossesse, j'insiste à chaque grossesse, (ce n'est pas sur une fratrie, il n'y a pas un quart d'enfants atteins), il y a 1 risque sur 4 que les deux copies anomales soient transmises et que l'enfant soit sourd.
Donc le gène de la Connexine 26 et le gène du syndrome de Pendred sont des gènes qui se transmettent comme ça. En général les enfants ont éventuellement des frères et sœurs sourds ou des frères et sœurs entendants mais ils ont 2 parents entendants qui sont tous les 2 porteurs d'une anomalie dans le même gène .
Le gène de la Connexine 26 et le gène de du syndrome de Pendred étant 2 gènes différents, un individu qui va avoir 1 gène de la Connexine 26 anormal mais l' autre copie normale et 1 gène du syndrome de Pendred anormal et l' autre copie du gène du syndrome de Pendred normal va être parfaitement entendant, il est porteur mais étant donné qu'il a au moins 1 copie de chacun des gènes normal il est entendant.
Donc si 2 parents qui ont 2 causes de surdités différentes dues à 2 gènes différents récessifs transmettent à leur enfant chacun une anomalie mais dans 2 gènes différents , si l'autre parent n'est pas par hasard lui-même porteur d'une anomalie dans le même gène ,par exemple il faut quand même être sûr que la personne qui a la surdité due à la Connexine 26 n'est pas aussi par hasard porteur d'une anomalie du syndrome de Pendred et que le conjoint qui est porteur du syndrome de Pendred n'est pas porteur complètement par hasard d' 1 anomalie de la Connexine 26. si c'est le cas , si la personne qui a le Pendred et la Connexine 26 totalement normale , et la personne qui a l'anomalie de la Connexine 26 normale et le Pendred totalement normale ,ils n'ont que des enfants entendants qui seront tous porteurs d'une anomalie du gène de la Connexine 26 et d'une anomalie du syndrome de Pendred mais qui entendront parfaitement bien .
Et on est tous porteurs de tas de choses, moi je suis peut être porteuse de l'anomalie de la Connexine 26 ou du syndrome de Pendred, je n'en sais rien, je ne l'ai pas testé, je n'ai pas d'enfants sourds donc je n'ai aucune raison de le faire.
Il faut vous dire que pour la Connexine 26 qui est le gène le plus fréquemment atteint dans la surdité de l'enfant, je répète 1 cause sur 3 dans la surdité de l'enfant ( de toutes les causes génétiques ou pas , en France,) il y a 3% de la population européenne entendante qui porte une copie anormale de ce gène et qui ne le savent pas la plupart du temps ,ils n'ont pas d'enfants sourds .donc voilà , ce que je veux dire c'est qu'on peut avoir un syndrome de Pendred , et être aussi porteur d'une anomalie de Connexine 26 par hasard donc voilà .
donc La réponse est en générale OUI sauf qu'il y a un petit bemol, faut juste quant même vérifier que chacun n'est pas porteur sur le gène de l'autre.

7 - 33:47 --Une de nos adhérentes adulte a participé , en 2009, à une recherche non interventionnelle avec collection biologique intitulée "Epidémiologie génétique des surdités dominantes non syndromiques" (SURDOM) . Des échantillons sanguins familiaux ont été envoyés pour cette étude il y a 5 ans. Qu'en est il de ces échantillons sanguins familiaux envoyés il y a 5 ans, car aucun résultat ne semble avoir été transmis aux personnes concernées ? Et sinon, est ce qu'ils sont utilisés ultérieurement ? Et que doit elle faire faire comme suivi à ses enfants de 28 et 24 ans qui ne sont pas atteints mais ayant un fort potentiel familial ?

Le protocole de recherche qu'on a appelé SURDOM : c'est un protocole qui a eu un financement par ce qu'on appelle un PHCR, c'est à dire que le ministère de la santé qui donne des financements à certains protocoles de recherche qui partent des hôpitaux.

Dans ce protocole, on a principalement regroupé des cas familiaux pour lesquels on a stocké des prélèvements d'ADN et on a mis dans des bases de données les audiogrammes de ces personnes.

Sur certaines de ces familles pour lesquelles on pouvait déjà imaginer quel était le gène atteint, on a fait ces recherches et, si c'est le cas, on a remis le résultat positif en consultation (car c'est obligatoire de donner ces résultats en consultation) ou négatif, parfois par courrier.

Je ne sais pas si c'est moi qui ait vu cette personne ou un collaborateur de province, mais s'il y a eu des tests génétiques, au moins une personne de cette famille (dont on a utilisé le prélèvement, si on a fait des tests parce qu'on se disait qu'on avait déjà une idée au départ de ce que ça pouvait être), cette personne a du recevoir les résultats.

Parce que je tiens toujours au courant mes patients, à chaque étape. soit je les revois parce que je trouve, soit je ne les revois pas mais je leur envoie les résultats en leur disant que je vais continuer.

Ces prélèvements vont être utilisés pour la 1ere étape de la nouvelle technique dont je vous ai parlé avec l'étude de plusieurs dizaines de gènes à la fois puisque nous n'avions pas la possibilité financière de pouvoir faire tous ces tests pour chacune des familles avant d'avoir cette technique.

C'est à dire que le financement qu'on a eu pour le projet SURDOM nous a servi à stocker ces prélèvements, à extraire l'ADN des tubes de sang, à mettre les renseignements dans une base de données et à faire quelques test génétiques pour quelques familles pour lesquelles on avait déjà une idée de ce que cela pouvait être.

Il faut dire que beaucoup de gènes dans les surdités isolées de l'adulte sont des gênes pour lesquels on a très peu de renseignements cliniques.
C' est à dire qu'ils ont été trouvés sur une seule famille dans le monde par un laboratoire de recherche.On ne sait parfois même pas ce que cela donne exactement car beaucoup de laboratoires de recherche dans le monde sont un peu déconnectés de la partie clinique (c'est à dire qu'ils n'ont pas de centre de référence avec un clinicien, c'est à dire quelqu'un qui voit les gens ,qui connaît vraiment la surdité).
C'est parfois dans des pays où il y a peu de prise en charge (par exemple des pays en voie de développement ou sous-développés) et donc là on n'a même pas d'audiogramme dans la publication qui est faite, on ne pourra, nous, avoir une idée d'aller tester ce gène là si on ne le fait pas systématiquement (puisqu'on sait à peine ce que cela donne, on sait que cela donne une surdité, ce qu'on oublie, mais on ne sait pas ce que cela donne car il n'y a pas de scanner, d'audiogramme).
On n'a pas les moyens de s'orienter.

Or comme vous l'avez compris, il y a plein de gènes différents. Donc c'est très difficile d'avoir une idée précise au départ sauf pour certains, la quinzaine dont je parlais.Il y a des gènes qui donnent exactement la même chose les uns par rapports aux autres et il y a pour beaucoup de gènes, surtout dans les surdités progressives de l'adulte, on ne sait rien.

Tant que l'on n'aura pas fait cette étude systématique de rechercher d'anomalies dans tous les gènes, on ne pourra pas savoir quelle est la fréquence parce que par exemple, le gène WA (je dis n'importe quoi) existe peut être dans les populations du Pakistan mais peut être pas du tout en Europe ou à l'inverse, ce gène a peut-être était trouvé par hasard dans une famille du Pakistan mail il est peut être super fréquent en Europe.Pour l'instant, on n'en sait rien parce qu'il n'y a pas eu cette étude systématique de recherche dans tous les gènes responsables des surdités surtout de l'adulte.On l'a fait pour les enfants parce qu'on a commencé il y a beaucoup plus longtemps.On a une idée à peu près claire de ce que l'on trouve chez l'enfant même s'il y a encore plein de choses à faire. Chez l'adulte, c'est beaucoup plus énigmatique.

Donc, grâce à cette puce, on va pouvoir reprendre toutes les familles qui ont été rentrées dans SURDOM puisque ce sont des cas familiaux donc on sait que c'est génétique (c'est certain, cela ne peut pas être autre chose car il y a plusieurs personnes atteintes dans la famille).Et du coup, là il y aura des résultats de déjà tous les gènes que l'on connaît et on va aussi découvrir d'autres gènes grâce aux prélèvements qui nous ont été donnés par les famille dans ce cadre-là (puisqu'il y a encore beaucoup de gènes à découvrir qui ne sont pas connus aujourd'hui).

Pour répondre à cette personne, rien n'est oublié, tout est dans ma base de données et dans notre congélateur pour les prélèvements ; on a les audiogrammes (on rentre tous nos audiogrammes sur ordinateur . C'est un boulot énorme mais c'est cela qui permet de faire de la recherche.
Et de l'autre côté, ma collègue qui s'occupe du laboratoire , qui travaille tous les jours avec moi, a les prélèvements .donc Dès qu'on le pourra, on donnera les résultats aux familles, il n'y a aucun souci.

Ce qui est de la génération pour laquelle on n'a pas encore le tests génétiques, pour les enfants on ne sait pas.Pour l'instant on ne peut rien dire, il faut juste attendre qu'on ait ces résultats là pour éventuellement proposer à ces enfants d'avoir un test génétique parce je ne sais pas s'ils voudront savoir s'ils vont avoir une surdité qui va évoluer ou pas.C'est à eux de décider c'est pas à nous, et pouvoir dire "on arrête la surveillance, ou on n'arrête pas la surveillance".Mais tant qu'on n'a pas ces résultats-là, on ne peut pas le faire.La bonne pratique veut que l 'on continue de surveiller l'audition 1 fois par an.

8 - 40:53 --Une de nos adhérentes a effectué des examens et la recherche effectuée sur la mutation du gène de la connexine 26 a été négative, mais les résultats n'excluaient pas la possibilité d'un autre type de maladie génétique . Pourquoi le test n'est il pas effectué sur d'autres gènes ? Et est ce que vous effectuez de façon systématique de nouveaux tests sur tous vos échantillons? Sinon doit on reprendre rendez vous pour avoir de nouveaux tests ?

Alors comme je l'ai dit, si on prend en fait les formes de surdité qui apparaissent pendant l'enfance, on a fait déjà beaucoup de travail sur beaucoup de gènes, probablement on a trouvé les plus fréquents et on sait qu'une surdité chez l'enfant est d'origine génétique dans 80% des cas.
Donc c'est énorme ! Et il y a plus de 40 gènes qui ont été découverts dans ces formes. Dans les surdités qui commencent chez l'adulte, on a trouvé à peu près le même nombre de gènes mais ce qu'on ne sait pas c'est chez une personne qui est toute seule à être sourde dans sa famille, il n'y a pas d'antécédent familial, combien, quel est le pourcentage de forme génétique. Ca on ne sait pas encore pour les raisons que je viens d'expliquer, c'est à dire qu'on n'a pas la possibilité de tester à l'aveugle (note du traducteur: tester à l'aveugle les gènes de la surdité serait un comble !!!)tous les gènes, les uns après les autres, de surdité de l'adulte. parce que ça coûte trop cher, tout simplement !
Donc cette technique de plus avec plein de gènes à analyser d'un seul coup, va nous permettre, on l'espère d'avancer. Mais comme je l'ai dit, on commencera d'abord par les formes familiales parce que là ça va nous donner une idée de ce qu'on va pouvoir chercher en priorité, chez les personnes qui ont une forme toute seule, ce qu'on appelle sporadique, pour lequel ils sont les seuls à être sourds dans la famille.
Donc en bref, quand à chaque étape, quand on fait un test génétique, je reprends le dossier avec ma collègue qui fait les tests en laboratoire et nous discutons de savoir à chaque fois est ce qu'on a à priori peut être d'autres idées. S'il y a une autre idée en fonction de ce que j'ai dit, la date d'apparition,l'existence d'acouphènes, de vertiges, la forme de la courbe, l'IRM, le scanner, plein de choses, tout le dossier, on reprend tout le dossier. Et moi je dis à ma collègue le docteur Jonard , voilà je souhaiterais que tu continues sur cette analyse là. Si j'ai pas d'idée, pour l'instant on s'arrête là, mais on ne perd rien et on sait dans notre ordinateur que c'est une forme non résolue et on ressortira ce dossier soit parce que on va trouver un gène, un nouveau gène et que on va sélectionner les dossiers qui ressemblent à ce que présente la famille où on a trouvé ce nouveau gène, soit quand on va avoir les résultats des études familiales grâce à la puce.
Pour vous donner un exemple, il y a à peu près 2 ans si je ne me trompe pas, parce que le temps passe vite, on a mis en évidence un nouveau gène dans les surdités de l'enfant qui s'appelle la stéréocilline et qui donne comme la connexine 26 une surdité tout à fait isolée qui commence très tôt dans l'enfance. Mais cette surdité n'est que d'importance moyenne. Ca ne peut pas donner de surdité profonde, c'est quelque chose de très stable. On a monté ce diagnostic qui est très difficile à faire sur le plan technique, mais j'ai repris parmi mes huit mille dossiers tous les patients pour lesquels nous n'avions pas trouvé la cause et qui répondaient au critère "surdité à la naissance ou très tôt, moyenne, stable, sans malformation de l'oreille interne, pouvant être récessive, c'est à dire avec 2 parents qui entendaient". On a repris tous nos dossiers. Tous les prélèvements sont passés les uns après les autres et on en a trouvé 15%.
Et donc il y a des gens que je re-convoque 10 ans après, en leur disant "voilà j'ai trouvé quelle est la cause de la surdité de tel enfant".
Voilà, donc comme quoi, on n'oublie pas !

9 - 45:18 --C'est donc très important de venir vous voir, même s'il n'y a pas de traitement immédiat ?

Alors venir en consultation génétique ça permet donc plusieurs choses, je pense que aujourd'hui pour vous résumer quand c'est une forme congénitale ou précoce pendant l'enfance, j'arrive à trouver la cause sans la puce,'donc que je n'ai pas encore les résultats de notre super puce ),6 fois sur 10 donc c'est pas mal quant même.
Dans les formes progressives de l'adulte, je dois en être à peut près à 20% à peu près quand c'est que la personne qui est toute seule dans la famille à être atteinte, j'arrive à trouver la cause on va dire dans 20% des cas mais sans la puce .Avec la puce on espère être bien meilleur ! et je pense que c'est important de faire cette démarche parce que il suffit que cette puce se mette à bien fonctionner, on va pouvoir dans un an être beaucoup plus opérationnel et avoir plus de résultats c'est vraiment ce qu'on espère avec cette nouvelle technique.
Et puis comme je vous l'ai dit la recherche avance il va y avoir des protocoles probablement dans une dizaine d'années j'espère pour essayer de faire des essais thérapeutiques, si on ne sait pas quelle est la cause de la surdité de cette personne, on ne pourra pas lui proposer ces essais.
Il faudra forcement passer par la détermination de la cause pour passer par un essai sur les cellules ciliées ou sur tel gène, si on ne sait quelle est la cause de votre surdité on va pas vous proposer de rentrer dans un protocole d'essai thérapeutique, c'est pas possible.
Donc ça a cet intérêt aussi de centraliser toutes les informations au niveau d'un seul centre qui est spécialisé pour l'avenir et puis je voudrais dire aussi que il y a comme je vous l'ai dit des surdités syndromiques où il y a des signes qui apparaissent secondairement et donc c'est important de tenir au courant le généticien qui a vu la personne , de l'évolution sur le plan général sur d'autres organes .Je vous prends un exemple ; il y a par exemple une surdité qui est là à la naissance mais qui peut aussi apparaitre un peu plus tard qui va donner un peu après, décalé forcément, ce qu'on appelle une insuffisance ovarienne primitive, c'est-à-dire que chez les jeunes filles ne vont pas déclencher leur puberté , enfin elles ne vont pas avoir de règles ou alors elles vont avoir des règles très chaotiques et elles vont avoir beaucoup de mal pour avoir des enfants, on pourrait penser que ça n'a aucun lien chez une jeune fille qui est sourde, c'est pas toujours une surdité profonde c'est même rarement une surdité profonde , elle apparait pendant les premières années de vie ou même un petit peu + tard , Si moi ' ai vu cette enfant quant elle avait 5 ans, je ne peux pas deviner qu'elle va avoir des problèmes de procréation quand elle en a 20 ou à 25 , si on ne fait pas le lien, on va passer à côté de ce qu'on appelle un syndrome de Perrault et c'est un gène qui a une action au niveau des 2 organes : au niveau des ovaires et au niveau de l'oreille , et nous on vient de participer à la découverte de 5 gènes pour cette même pathologie. Mais parce que c'est une collaboration entre des services d'endocrinologie adulte et des gens qui ont des difficultés des procréations et moi , et donc on s'est rendu compte que on avait un certain nombre de dossiers en commun et on s'est dit que ça correspondrait à ça, comment on peut faire, on a commencé les études familiales ,on va bientôt faire les tests pour cas isolés pour lequel il y a une seule fille atteinte et figurez-vous que chez les garçons que ça ne donne qu'une surdité donc si je ne sais pas si le jeune homme ne me tient au courant, que sa sœur est sourde et ne peut pas avoir des enfants, moi je ne vais pas découvrir qu'il a un syndrome de Perrault, c'est absolument indispensable de tenir au courant les évolutions, voilà , parce que on peut découvrir d'autres choses et ça c'est directement avec des conséquences parce que l'on sait comment évoluent et la surdité et les problèmes ovariens , dans cette forme de surdité du syndrome de Perrault.

10 - 49:55 --Ces tests sont ils pris en charge par l'assurance maladie ?

Le test de routine, c'est un test de biologie, donc, c'est pris en charge par la Sécu et par les Mutuelles comme un test de biologie classique. Il ya une cotation et c'est remboursé par la Sécu avec une part mutuelle comme n'importe quel prélèvement sanguin.
Les tests qui par exemple sont des tests plus de recherche comme la puce, ils ne sont pas du tout facturés parce que, de toute façon, ils ne sont pas à la nomenclature de la Sécurité Sociale. A partir du moment où ce n'est pas facturé, ce n'est pas reconnu, ce n'est pas pris en charge par la Sécu, on ne facture pas aux patients.
C'est dans le cadre de l'activité du laboratoire et de financement que l'on va retrouver autrement en répondant à des appels d'offre de recherche par exemple, ou en prenant sur la dotation générale du laboratoire, ce qui nous pose des problèmes parce que cela coûte cher, mais on ne va pas facturer ça aux patients c'est clair. Et les consultations, ce sont des consultations de spécialité, donc c'est des consultations hospitalières prises en charge comme d'habitude. Il n'y a rien de spécial là dedans.

11 - 51:04 -- Donc concrètement, si on veut venir vous voir, c'est au sein de l'hôpital de la Pitié-Salpétrière ou au sein de l'institut Imagine ?

Voilà, si c'est pour un enfant avant 15 ans on va dire, c'est à l'Institut IMAGINE à l'hôpital Necker. Si c'est pour un adulte qu'il ait une surdité à la naissance ou une surdité progressive, c'est au sein du service de génétique de la Pitié Salpétrière.
- Merci beaucoup. - De rien !